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Pr Arouna Ouedraogo, Chef de Service de Psychiatrie, CHU Yalgado Ouédraogo, Ouagadougou, Burkina Faso

« Les CLSM : une source d’espoir pour un changement de paradigme sur la maladie mentale au Burkina Faso »

Alors que le Burkina Faso est en proie aux attentats djihadistes, constatez-vous une recrudescence des consultations liées à des problèmes de santé mentale dans votre service ? Quel retentissement ont ces événements sur la santé mentale de la population ?  
Les recours aux soins pour des problèmes de santé mentale augmentent au fil du temps dans mon service. Les raisons sont certes multiples mais la part du contexte sécuritaire me semble prépondérante. En termes de retentissement, il faut admettre que la récurrence des attaques terroristes constitue des évènements éprouvants qui concernent en premier les forces de défense et de sécurité, les volontaires pour la défense de la patrie (supplétifs civils), les populations civiles victimes directes ou témoins de ces attaques. En raison du nombre important de morts et de personnes déplacées internes occasionnées par ces attaques récurrentes, c’est la population burkinabè tout entière qui est endeuillée. Par conséquent, la détresse psychologique, les syndromes psychotraumatiques, et d’une manière générale les autres réactions pathologiques prennent un relief particulier.
Quel sont les principaux résultats de l’enquête sur la santé mentale au Burkina Faso menée avec le CCOMS et Expertise France ?  
L’enquête qui s’est déroulée en 2021 nous a permis de faire l’état des lieux de la santé mentale au sein de la population générale sur toute l’étendue du territoire national. Nous avons d’abord observé l’importance de l’exposition aux situations stressantes et événements potentiellement traumatisants au sein de la population générale au Burkina Faso : 42,51 % des personnes interrogées rapportaient une telle exposition.
En termes de prévalence des troubles mentaux, si l’on considère l’ensemble des troubles repérés par le MINI, 33,49 % des personnes enquêtées au Burkina Faso avaient au moins un trouble mental. Les tableaux cliniques les plus fréquemment rencontrés étaient la dysthymie (10,26 %), l’épisode dépressif (9,82 %) et le trouble panique (6,30 %).
Entre autres facteurs de risque associés à la survenue de troubles, nous avons constaté que le fait de résider dans les régions à sécurité précaire était associé à un risque accru de déclarer un trouble mental par rapport aux personnes qui résidaient dans les zones moins touchées par les attaques terroristes.
Un autre résultat assez préoccupant de la présente enquête a été le faible recours aux soins chez les personnes ayant déclaré au moins un trouble mental : en effet, seulement 30,76 % d’entre elles avaient eu recours aux soins.
Sur à la récente mission du CCOMS, soutenue par Expertise France, et à l’action de plusieurs villes françaises*, les CLSM ont fait leur apparition dans votre pays. En quoi ce dispositif vous semble être pertinent ?  
Il ne fait aucun doute que ces conseils locaux de santé sont très pertinents pour nos pays en développement, caractérisés par la persistance de préjugés sur la maladie mentale, une insuffisance de ressources humaines qualifiées en santé mentale et une stigmatisation et discrimination accrues à l’égard des personnes concernées par les problèmes de santé mentale. Dans cet environnement l’on comprend aisément que beaucoup de personnes souffrant de troubles mentaux ne bénéficient pas de prise en charge appropriée. C’est pourquoi la mise en place des conseils locaux de santé mentale constitue une source d’espoir pour un changement de paradigme sur la maladie mentale dans mon pays.
Quels sont vos projets pour continuer à améliorer la santé mentale de la population du Burkina Faso ?
Les besoins de mon pays étant immenses, il faut agir à la fois sur plusieurs leviers. Parmi ces projets, les plus urgents concernent : le renforcement des ressources humaines en santé mentale pour assurer avec plus d’efficacité la prévention, l’accès et la continuité des soins ; Le plaidoyer pour l’élaboration d’un cadre législatif et règlementaire spécifique en santé mentale ; La mise en place de stratégies de communication pour le changement social et comportemental. J’ajoute que toutes ces actions ne sauraient être menées de façon conséquente sans des données probantes issues de la recherche opérationnelle.

*Lyon, Bordeaux, Nice, Vence.

 

Retour sur la conférence IT4Anxiety de Lille
Le 11 octobre dernier, la conférence organisée par le CCOMS et Gac group dans la cadre du projet IT4Anxiety aura permis à la centaine de participants sur place de découvrir des solutions innovantes en santé mentale, d’en savoir plus sur les besoins et l'utilisation des outils numériques pour la gestion de l’anxiété, sur le rôle des référents e-santé à envisager dans les services de soins, ou encore sur l’appropriation de solutions innovantes dans les établissements de santé par la formation. Déborah Sebbane, directrice du CCOMS, a cité en introduction les principaux défis liés aux technologies digitales issus, notamment, du dernier rapport de l'OMS sur la santé mentale : développer l’écosystème numérique de santé ; s’appuyer sur les partenariats gouvernements-chercheurs-développeurs-personnes concernées ; faire participer les utilisateurs finaux à la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des solutions digitales ; mettre en œuvre ces solutions de façon éthique et sécurisée ; améliorer la litteratie en e-santé mentale et l’évaluation. Vinciane de Moffarts, manager de projet au CNP Saint-Martin (Belgique), a de son côté effectué un état des lieux d’IT4Anxiety. 5 hackathons ont été organisés et 24 start-up accompagnées par le projet. L’enquête IMAGINE sur les usages des outils digitaux a permis de recueillir plus de 1 200 réponses, qui sont en cours d’analyse, pour une publication attendue en septembre 2023, ce qui correspondra à la période de fin du projet. En outre, des tests d’utilisation d’outils ont été organisés et évalués, une plate-forme de e-learning a été créée, ainsi qu’une formation de 2 jours pour les professionnels qui sera testée à la fin de ce mois d’octobre. Des outils très concrets et des guides ont également été développés, sur des thèmes comme comment créer une startup, évaluer un outil numérique, créer une fiche de référent e-santé mentale pour les organismes de santé, etc. Enfin, 5 événements nationaux seront encore organisés, ainsi qu’une conférence finale en septembre 2023 à Namur.


30 novembre, Nantes : Journée nationale des CLSM
L'association Elus, santé publique et territoires (ESPT) et le Centre national de ressources et d'appui aux CLSM (CCOMS) co-organisent le 30 novembre 2022 à Nantes la 7ème journée nationale des CLSM sur le thème : “Un CLSM par territoire : plus qu’une option, une nécessité !” La journée est gratuite et ouverte à tous ! Elus locaux, psychiatres, médecins, aidants, usagers de la santé mentale et/ou toute personne intéressée par les problématiques de santé mentale sur les territoires, la démocratie participative en santé mentale, la mise en place d'actions en faveur de la santé mentale des populations - inscrivez-vous !
Découvrez-le programme de la 7ème journée nationale des CLSM
Lien d'inscription à la 7ème journée nationale des CLSM

Santé mentale périnatale : deux rendez-vous dans le cadre du projet PATH
La conférence finale du projet européen PATH, dont le CCOMS est partenaire, organisée le 16 novembre, à Anvers (Belgique), proposera les présentations de plusieurs intervenants internationaux et des posters dans le domaine de la santé mentale périnatale, ainsi que des sessions interactives sur "l'épanouissement des parents sur le lieu de travail" et "le rôle des professionnels de la santé dans la promotion de la santé mentale périnatale".
Information et inscription ici.
En outre, le CCOMS animera, le 18 novembre à Avignon, dans le cadre du 15ème Colloque de (psy)périnatalité de l’ARIP, le symposium "Santé mentale périnatale : dispositifs inspirants en France et à l’international".
Information et inscription ici.

 

28 novembre – 3 décembre, Lille : Congrès français de psychiatrie
Rendez-vous à Lille pour le prochain CFP. Toute personne inscrite à l’ensemble du congrès a accès : au Forum des Associations ; aux Journées de la Psychiatrie de la Personne Âgée ; à la Journée Sciences Infirmières et Recherche Paramédicale ; à la Journée de l’Accompagnement et de l’action médico-sociale. À distance : 2 sessions seront également diffusées en direct sur le e-CFP et l’ensemble des sessions seront disponibles à la demande jusqu’au 28 mars 2023. Comme chaque année, le CCOMS vous accueillera avec plaisir sur son stand.

DREES - Santé mentale : une amélioration chez les jeunes en juillet 2021 par rapport à 2020 mais des inégalités sociales persistantes
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) publie une nouvelle étude consacrée à la santé mentale et à l’épidémiologie psychiatrique en population générale. C’est la troisième étude d’une série couvrant les années 2020 et 2021 réalisées à partir de la cohorte EpiCov.
A lire ici.

Appel à projets de la Fondation des hôpitaux : équipes mobiles et pédopsychiatrie
Alertée par les professionnels du secteur de la dégradation de la santé mentale des jeunes, associée à un sentiment généralisé d’aggravation des situations de prise en charge, la Fondation des hôpitaux a lancé deux appels à projets. Le premier porte sur l'amélioration de l'accueil et de la prise en charge en pédopsychiatrie (création d’unités de prise en charge, amélioration des espaces de prise en charge, développement de la prise en charge à distance, activités, séjours) et le second sur la création et le développement d'unités mobiles (véhicule, aménagement et équipement, matériel informatique…).
Date de clôture : 31 octobre 2022.
En savoir plus.

Troisième édition du Baromètre Unafam et campagne #ParlonsEnAutrement
Lancé le 6 octobre, à l’occasion de la Journée nationale des aidants, la troisième édition du Baromètre Unafam fait écho des difficultés croissantes rencontrées par les 4 000 répondants : errance face aux premiers symptômes, stigmatisation encore trop présente au quotidien, accompagnement qui fait toujours défaut. Cette édition 2022 met en exergue la parole des frères et sœurs de personnes vivant avec des troubles psychiques : si près de la moitié d’entre eux se considèrent comme des aidants (46%), seulement 35% se sentent suffisamment informés sur les maladies psychiques.
A l’occasion de la Journée Mondiale de la Santé Mentale, l’Unafam a par ailleurs lancé la campagne #ParlonsEnAutrement pour lutter contre la stigmatisation des troubles psychiques et ses impacts sur les personnes concernées. Un site Internet dédié, parlonsenautrement.unafam.org, est lancé à cette occasion.

15 décembre, Paris - Médicaments : où en est-t-on en psychiatrie ?
L’association U_P propose une journée de réflexion et de partage sur le thème de l’usage des médicaments psychotropes. Elle donnera la parole à des personnes concernées, des acteurs associatifs, des chercheurs et professeurs, français et étrangers, ayant travaillé sur le sujet. Alors que les traitements médicamenteux en psychiatrie sont très souvent présentés comme la pierre angulaire des soins dans les troubles dit "sévères", et que leur usage tend même à s’accroitre, la manière de réduire ou d'arrêter ces traitements en toute sécurité n'est pas largement discutée ou enseignée, ce qui signifie que les personnes prises en charge n'ont souvent pas accès à des conseils ou à un soutien utiles et se retrouvent parfois seules face au sevrage. Cette journée permettra de réaliser un état des lieux des connaissances et des pratiques, et de proposer un temps de réflexion et de transmission.
Programme, inscription.

Journée mondiale de la Santé Mentale : rapport de la Commission du Lancet
A l’occasion de la Journée mondiale de la Santé Mentale - qui a eu pour thème cette année "Faire de la santé mentale et du bien-être pour tous une priorité mondiale", le 10 octobre dernier, la Commission du Lancet a publié un rapport titré "Mettre fin à la stigmatisation et à la discrimination en santé mentale". Alors que de nombreuses personnes décrivent la stigmatisation comme "pire que la maladie elle-même", ce document rassemble des preuves et des expériences sur l'impact de la stigmatisation et de la discrimination et des interventions réussies pour la réduction de la stigmatisation. Le rapport est coproduit par des personnes qui ont vécu des problèmes de santé mentale et comprend du matériel pour faire entendre la voix des personnes ayant vécu une telle expérience.
Voir le wébinaire de lancement.
Lire le rapport.

Nouvelles Lignes directrices de l’OMS sur la santé mentale au travail
L'OMS et l'Organisation internationale du travail (OIT) ont appelé, le 28 septembre dernier, à des actions concrètes pour répondre aux problèmes de santé mentale de la population active. On estime que 12 milliards de journées de travail sont perdues chaque année en raison de la dépression et de l'anxiété, ce qui coûte à l'économie mondiale près de 1 000 milliards de dollars. Les nouvelles directives mondiales de l'OMS sur la santé mentale au travail sont renforcées par des stratégies pratiques décrites dans une note d'orientation conjointe de l'OMS et de l'OIT. Les lignes directrices de l'OMS sur la santé mentale au travail fournissent des recommandations fondées sur des données probantes pour promouvoir la santé mentale au travail, prévenir les troubles mentaux et permettre aux personnes atteintes de troubles mentaux de participer et de s'épanouir au travail. Les recommandations portent sur les interventions organisationnelles, la formation des gestionnaires et celle des travailleurs, les interventions individuelles, le retour au travail et l'obtention d'un emploi. La note d'orientation de l'OMS et de l'OIT, Santé mentale au travail : note d'orientation, fournit un cadre pragmatique pour la mise en œuvre des recommandations de l'OMS. Elle définit spécifiquement ce que les gouvernements, les employeurs, les organisations représentant les employeurs et les travailleurs et les autres parties prenantes peuvent faire pour améliorer la santé mentale au travail.
Consultez le résumé en français des nouvelles directives mondiales de l'OMS sur la santé mentale au travail.

Guide de l'OMS pour l'intégration de la santé mentale périnatale dans les services de santé maternelle et infantile
La qualité des services de santé maternelle et infantile peut être améliorée pour toutes les femmes en créant des environnements respectueux, bienveillants, exempts de stigmatisation, où elles se sentent en sécurité pour discuter de toutes les difficultés qu'elles rencontrent. Le guide pour l'intégration de la santé mentale périnatale dans les services de santé maternelle et infantile, publié par l’OMS le 19 septembre 2022, propose une approche fondée sur des données probantes qui décrit comment les gestionnaires de programmes, les administrateurs des services de santé et les décideurs responsables de la planification et de la gestion des services de santé maternelle et infantile peuvent développer et maintenir des services intégrés de santé mentale de haute qualité pour les femmes en période périnatale. Il rassemble les meilleures preuves disponibles pour aider les prestataires de soins de santé maternelle et infantile à promouvoir une bonne santé mentale, à identifier les symptômes des problèmes de santé mentale et à réagir d'une manière adaptée à leur contexte local et culturel.
A télécharger ici (en Anglais).

Rien pour nous, sans nous : nouvelle série de films sur les personnes vivant avec des maladies non transmissibles et des problèmes de santé mentale
L’OMS a publié sur sa chaîne Youtube un court métrage documentaire qui met en lumière les expériences des personnes vivant avec des maladies non transmissibles (MNT) et des problèmes de santé mentale dans le monde. On y découvre par exemple l’expérience de Hauwa, une défenseure de la santé mentale et des droits humains du Nigéria, qui a été agressée sexuellement en 2013 et a reçu un diagnostic de trouble bipolaire deux ans plus tard. Les personnes ayant une expérience vécue peuvent souvent offrir une expertise précieuse et des récits puissants sur la façon d'améliorer sa santé. Leurs connaissances de première main peuvent aider à façonner les politiques, à créer de meilleurs programmes de santé et à inciter les autres à également contribuer. L'OMS souhaite faire progresser l'engagement significatif des personnes vivant avec des MNT et des problèmes de santé mentale dans le monde entier, et a récemment mis en place une gamme d'activités et de plateformes pour soutenir cet objectif. La dernière en date est cette nouvelle série de films sur le sujet dans les six langues des Nations Unies. En comprenant et en intégrant ces multiples perspectives, les décideurs politiques, les professionnels et prestataires de soins de santé et les personnes ayant des expériences vécues, peuvent passer des modèles de soins traditionnels descendants ou uniformes à la conception conjointe de programmes, de politiques et de programmes de santé. Les informations tirées de toutes les consultations et du film alimentent l'élaboration conjointe du Cadre de l'OMS pour un engagement significatif des personnes vivant avec des MNT et des problèmes de santé mentale, qui devrait être publié en 2023.
Regardez le documentaire de 30 minutes, "Rien pour nous, sans nous : écouter et apprendre des personnes ayant une expérience vécue"



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La Lettre du Groupement de coopération sanitaire pour la recherche et la formation en santé mentale est éditée par le Centre collaborateur de l'OMS (CCOMS), service de l’EPSM Lille métropole. Le GCS a pour objet la recherche, la formation et la mise en œuvre d’actions visant le développement de dispositifs de santé mentale intégrés dans la cité, incluant la prévention et l’insertion des publics souffrant de troubles mentaux. Le Groupement œuvre à la promotion des échanges professionnels et à toute action de lutte contre la stigmatisation en santé mentale et en psychiatrie. Il favorise et soutient la participation des représentants des usagers, des familles et des aidants. Le GCS, dont le conseil scientifique est celui du CCOMS de Lille, relaie les recommandations de l’OMS au niveau national et localement.

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